Êtes-vous récemment tombés sur un article démontrant les conséquences positives des équipes auto-organisées sur la motivation, l’engagement et la performance des employés? Alternativement, vos équipes Scrum vous répètent-elles les avantages de l’auto-organisation? Sans égards à votre motivation initiale, vous en êtes arrivés à considérer sérieusement la mise en place d’équipes auto-organisées.

Soudainement, certains gestionnaires et quelques employés démontrent de la résistance. Ils vous partagent leurs réactions, leur compréhension des implications de la mise en place l’auto-organisation, ainsi que leurs inquiétudes reliées à celle-ci.

Comment faire pour distinguer les fausses perceptions de la réalité?

Notre formation sur la mise en place d’équipes auto-organisées répond à plusieurs des questions les plus fréquentes. L’intention de cet article est de démystifier certaines des erreurs les plus fréquemment commises en raison de suppositions erronées qui circulent relativement à la mise en place de l’auto-organisation.

Erreur #1 – Supposer que tous ont la même compréhension de ce que signifie l’auto-organisation.

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(image par Jeremy Allouche)

Avant de tenter de la mettre en place, il est critique de définir ce que signifie l’auto-organisation dans le contexte de votre organisation. L’expérience et les recherches ont démontré qu’il existe de nombreuses confusions entre la notion de délégation, d’auto-organisation et d’autogestion. La définition que nous avons retenue de l’auto-organisation est…

Une équipe auto-organisée est un groupe d’individus travaillant ensemble à leur manière, vers un but commun qui est défini en dehors de l’équipe.

Nonobstant cette définition, l’élément principal à adresser pour éviter la confusion autour du terme consiste à établir une définition claire et commune de ce que signifie l’auto-organisation dans votre entreprise. L’important est que les intervenants (employés, équipes, gestionnaires et exécutifs) se mettent d’accord sur la même définition de ce que représente le concept d’auto-organisation pour éviter les dissensions et la confusion sur l’objectif souhaité.

Solution : Établir une définition claire et commune de ce que représente l’auto-organisation dans votre entreprise.

Erreur #2 – Présumer que les équipes auto-organisées n’ont pas besoin de gestionnaires ou de leaders.

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(image par rawpixel)

Lorsqu’ils sont introduits au concept d’auto-organisation, plusieurs gestionnaires traditionnels ont peur de perdre le « contrôle » de leur équipe. Bien que la notion de gestion existe toujours dans les équipes auto-organisées, une partie importante de celle-ci est prise en charge par les membres de l’équipe grâce à la mise en place de règles de fonctionnement et de mesures de performance.

Bien qu’il y ait une distinction entre gestionnaire et leader, il est erroné de s’imaginer que les équipes auto-organisées n’ont pas besoin de l’un ou de l’autre. La vérité est que les équipes auto-organisées ont toujours besoin de gestion et de leadership, mais le type et le style de gestion diffèrent de ceux auxquels sont habituées les équipes traditionnelles.

Alors que les gestionnaires traditionnels sont responsables de planifier, organiser, diriger et contrôler, le rôle des gestionnaires agiles consiste à soutenir l’auto-organisation, à coacher l’équipe auto-organisée et l’accompagner dans la mise en place d’amélioration continue.

Même si le terme « auto-organisation » signifie que les membres de l’équipe s’organisent eux-mêmes pour atteindre les objectifs établis, ils ne le font jamais sans un mode de gouvernance clairement établi. En effet, les équipes auto-organisées fonctionnent à l’intérieur d’un cadre défini au sein de l’entreprise et, par conséquent, elles doivent respecter certaines règles de fonctionnement. Dans ce sens, le rôle du gestionnaire (ou du coach d’équipe) consiste notamment à s’assurer que le modèle de gouvernance est clairement établi et qu’il est respecté.

En somme, l’équipe auto-organisée n’a plus besoin de commandants et de contrôle (command and control) de la part de leur gestionnaire, mais plutôt d’une posture de gestionnaire au service (généralement nommée “servant leader”) de son équipe. Sa contribution est entre autres d’aider l’équipe à régler ses problèmes.

Quant à l’absence d’un leader, cette hypothèse est aussi incorrecte. À l’intérieur des équipes auto-organisées, des leaders vont naturellement émerger en fonction des enjeux rencontrés, des circonstances et des compétences de chacun. Par exemple, certains membres de l’équipe possèdent des compétences techniques dominantes, alors que d’autres ont développé des compétences relationnelles fortes. Par conséquent, ceux qui possèdent les compétences deviennent naturellement les leaders dans la résolution des enjeux rencontrés. Ainsi, il y a une alternance dans l’exercice du leadership de l’équipe selon les besoins.

Solution : Accompagner les gestionnaires traditionnels dans leur transition vers un rôle de gestionnaire agile et laisser le leadership naturel émerger au sein de l’équipe auto-organisée.

Erreur #3 – Croire que les membres de l’équipe savent quoi faire pour s’auto-organiser.

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(image par Mishal Ibrahim)

Alors qu’elle est courante dans la nature et dans la vie courante, l’auto-organisation est un phénomène relativement récent dans le contexte professionnel. Historiquement, l’industrialisation a segmenté les tâches, spécialisé les employés, mis en place des mesures de contrôle et nommé des gestionnaires pour assurer un fonctionnement efficace.

Dans ce contexte, peu d’employés ont eu l’opportunité de vivre l’auto-organisation au travail. Par conséquent, il est faux de s’imaginer que les membres d’une équipe savent instinctivement quoi faire pour mettre en place l’auto-organisation. Toutefois, avec l’accompagnement d’un coach, il devient possible de mettre en place les premières actions structurantes, dont l’établissement du carré de sable de l’équipe. Alternativement, les membres de l’équipe auraient également avantage à bénéficier de formations appropriées dans le but de développer les connaissances et compétences nécessaires à la mise en oeuvre de l’auto-organisation.

Solution : Offrir de l’accompagnement (coaching d’équipe) et de la formation aux membres de l’équipe auto-organisée, ainsi qu’aux gestionnaires qui la soutiennent.

Erreur #4 – Juger qu’il n’est pas nécessaire de limiter la portée de l’auto-organisation.

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(image par NeONBRAND)

Lorsqu’une organisation tente l’expérience de l’auto-organisation, certains imaginent qu’un tel changement se fait aussi simplement que de changer la sorte de café offerte aux employés.

En plus d’une bonne gestion du changement, il est critique de limiter la portée de l’auto-organisation de deux manières.

Premièrement, il est sage d’initier l’expérimentation de l’auto-organisation avec une seule équipe afin de l’encadrer adéquatement, de soutenir les gestionnaires dans leur transition vers leur nouvelle posture et apprendre de cette expérimentation. Cette phase d’expérimentation est nécessaire afin de comprendre les ajustements et le soutien nécessaires à l’équipe en fonction du contexte organisationnel dans lequel elle fonctionne. Ces apprentissages pourront ensuite être répliqués et adaptés aux autres équipes qui prendront le virage de l’auto-organisation.

Deuxièmement, l’auto-organisation n’est possible qu’à l’intérieur de contraintes clairement établies. Lorsque des paramètres comme la contribution, les objectifs, les normes de fonctionnement et les contraintes de l’équipe ne sont pas clairement identifiés, l’auto-organisation n’est pas possible. C’est pourquoi il importe d’accompagner initialement les équipes dans l’établissement de leur carré de sable afin de les aider à comprendre le niveau d’autonomie dont elles bénéficient réellement.

Solution : Implanter l’auto-organisation de manière graduelle au sein de l’entreprise et définir clairement le niveau d’autonomie des équipes auto-organisées.

Erreur #5 – Supposer que la mise en place de l’auto-organisation est une activité unique.

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(image par freestocks.org)

Souvenons-nous que la mise en place avec succès de l’auto-organisation ne se fait pas du jour au lendemain. Nous avons mentionné (voir erreur #3), que les membres d’une équipe nouvellement auto-organisée ne savent pas comment devenir autonome.

En fait, même lorsque les équipes ont adopté l’auto-organisation depuis un certain temps, ils doivent continuellement se réorganiser de manière à répondre aux nouvelles demandes, au contexte changeant et aux nouvelles contraintes auxquelles elles sont confrontées. En d’autres mots, l’auto-organisation est un processus continu! Chaque fois que la configuration de l’équipe change ou que de nouveaux éléments apparaissent, l’équipe doit s’adapter.

De la même manière, chacun des membres de l’équipe doit poursuivre son adaptation personnelle à l’auto-organisation, puisque les normes de fonctionnement et les manières de faire évoluent avec l’arrivée (ou le départ) de membres dans l’équipe et les changements de contextes organisationnels.

Solution : Offrir de l’accompagnement et de la formation aux équipes auto-organisées, même lorsqu’elles sont matures afin qu’elles puissent poursuivre leur évolution.

Erreur #6 – Supposer que l’auto-organisation peut être appliquée à tous les contextes et à toutes les entreprises.

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(image par Mikael Kristenson)

Bien qu’en principe cette hypothèse semble exacte, la réalité nous a démontré que plusieurs prérequis sont nécessaires pour assurer le succès d’un tel mode de fonctionnement.

L’expérience nous a démontré que certains des principaux prérequis sont :

    • La volonté des membres de l’équipe de faire partie d’une équipe auto-organisée.
    • Des membres de l’équipe qui partagent des valeurs, des intérêts et des préjugés favorables à la collaboration et à l’auto-organisation.
    • Une culture organisationnelle qui soutient l’auto-organisation.
    • Un mandat clair et motivant.

Solution : L’auto-organisation ne peut être mise en place dans tous les contextes et certains facteurs en accélèrent l’adoption.

Erreur #7 – Penser que c’est l’équipe qui doit tout décider!

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(image par Margarida CSilva)

La mise en place de l’auto-organisation est souvent faussement comparée à la rébellion de la phase de l’adolescence. Alors que les actions et les comportements des membres de l’équipe étaient régis par un gestionnaire, dès que les membres de l’équipe obtiennent un grand niveau d’autonomie, l’effet de pendule est initié.

En rébellion contre l’autorité et les anciennes manières de fonctionner, les membres de l’équipe s’opposent généralement à toute forme d’intrusion de la part d’une partie externe prétextant que “ce sont les membres de l’équipe doivent tout décider”.

Cette hypothèse est incorrecte. L’équipe a l’autonomie de prendre des décisions à l’intérieur du carré de sable qui a été établi. Lorsque des éléments externes au carré de sable viennent à changer, les membres de l’équipe doivent réajuster leur mode de fonctionnement pour s’adapter à ces changements.

Par exemple, ce n’est pas l’équipe qui peut changer de manière autonome son budget d’exploitation. Si l’équipe se rend compte de besoins additionnels, elle doit partager ses conclusions avec la personne responsable du budget afin qu’il soit ajusté. Cependant, la décision finale d’ajuster le budget revient à la personne qui en est responsable. C’est pourquoi le budget est généralement établi comme une contrainte dans le carré de sable de l’équipe. Cette dernière n’ayant pas l’autorité décisionnelle sur tous les éléments de son fonctionnement.

Solution : L’établissement du carré de sable de l’équipe permet d’établir les zones dans lesquelles l’équipe est responsable de prendre les décisions – et celles où elle ne l’est pas.

Erreur #8 – Supposer qu’on ne peut rien faire lorsque l’équipe n’atteint pas ses objectifs.

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(image par Atik sulianami)

Cette hypothèse est partiellement erronée.

Lorsque cette hypothèse est prononcée par l’ancien gestionnaire de l’équipe, elle est exacte. En effet, le gestionnaire agile dont l’équipe s’est auto-organisée doit faire une transition vers une nouvelle posture.

Cependant, lorsque la phrase est prononcée par la personne qui établit les objectifs de l’équipe (dans un contexte agile, le Product Owner), celle-ci doit en effet travailler avec l’équipe auto-organisée afin de comprendre la situation problématique, de retirer les obstacles et possiblement d’ajuster les objectifs afin d’aider l’équipe à atteindre les objectifs établis.

Solution : Le nouveau mode de fonctionnement de l’équipe auto-organisée n’exclut pas les interventions externes pour l’aider à atteindre ses objectifs. Les manières d’intervenir varient cependant comparativement aux approches traditionnelles de gestion.

Vous aimeriez en savoir plus sur les fausses idées autour de l’auto-organisation et la mise en place efficace d’équipes auto-organisées? Nous abordons en détail ce sujet (et plusieurs autres) dans cette formation.

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Merci à Maryse St-Denis, Annie Lachance et Denis Migot pour leur contribution à cet article.